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Je n’ai plus osé ouvrir la bouche… Témoignages de glottophobie vécue et moyens de se défendre. Le présent recueil de témoignages, principalement collectés ces trois dernières années par Stéphanie Clerc Conan et Philippe Blanchet, prend la suite de "Discriminations : combattre la glottophobie" pour donner la parole aux victimes et proposer des moyens de se défendre. Éditions Lambert-Lucas.
Type | Broché |
Année | 2018 |
Langue | Français |
Pages | 128 |
Format | 13,5 x 21,5 cm |
Distributeur | Éditions Lambert-Lucas |
ISBN | 978-2-35935-267-2 |
Je n’ai plus osé ouvrir la bouche… Témoignages de glottophobie vécue et moyens de se défendre - Philippe Blanchet, Stéphanie Clerc Conan
« J’aimerais vous remercier pour votre intervention à France Culture que j’ai écoutée avec beaucoup d’attention, vous avez réussi à mettre le doigt sur un mal-être qui touche un grand nombre de personnes, toutes catégories sociales confondues […]. En vous remerciant encore une fois pour votre contribution à l’étude [de la glottophobie] et en vous encourageant à continuer… »
Discriminations : combattre la glottophobie, de Philippe Blanchet, paru en 2016, a reçu un accueil médiatique très favorable (Le Point, Le Monde, Libération, La Croix, Mediapart, France Culture, France Inter, France Bleu, RTL, TV5 Monde, L’Express, Elle...) et a valu à l’auteur un abondant courrier de témoignages dont on trouvera ici de larges extraits.
Inscrite à la croisée des notions d’accent (ici alsacien, marseillais, toulousain, catalan, basque, marocain, tunisien, turc, espagnol, italien, québécois, populaire…) et de langues (étrangères ou régionales) d’une part, d’« identité nationale » et de « pureté de la langue » d’autre part, la glottophobie est une xénophobie fondée sur le mépris de la langue de l’autre. Le culte d’une langue, cette « passion française » en apparence innocente, et son revers, le rejet de celles et ceux qui parlent autrement, causent des dégâts de toutes sortes : politiques, sociaux, culturels, scolaires, psychologiques…
Le présent recueil de témoignages, principalement collectés ces trois dernières années par Stéphanie Clerc Conan et Philippe Blanchet, prend la suite de Discriminations : combattre la glottophobie pour donner la parole aux victimes et proposer des moyens de se défendre.
En couverture : Banksy, Graffiti removal (Londres, mai 2008)
Linguistique et sociolinguistique.
Éditions Lambert-Lucas.
Les auteurs:
P. Blanchet et S. Clerc Conan sont enseignants chercheurs à l’Université Rennes 2 (laboratoire Prefics).
Table des matières:
1. Présentation :
Donner la parole aux victimes de glottophobie ..................... 7
2. Témoignages de glottophobie vécue, classés par domaines et sous-domaines ................................... 13
2.1 Éducation (en famille, à l’école, au collège et au lycée, à l’université et dans les classes préparatoires aux grandes écoles, en recrutement et formation d’enseignant·e·s) ........ 13
2.2 Emploi (médias, enseignement, autres métiers) ............. 32
2.3 Santé (en orthophonie, à l’hôpital public) ......................... 38
2.4 Vie quotidienne (en général..., trouver un logement, garder son prénom, faire les courses, apprendre une langue minoritaire) ........................................................................ 40
2.5 Institutions (en général..., police, accueil des étrangers et des étrangères) ........................................................................... 45
2.6 Prises de conscience, résistances et émancipation ......... 49
3. Récits de vie (témoignages longs) ............................................... 53
3.1 « Une histoire de langues en pays catalan » (récit de Jeanne M.-D.) ................................................................... 53
3.2 « Baigner dans des milieux différents où les langues sont multiples » (récit de Yeter Akiaz) ...................................... 56
4. Exemples de glottophobie généralisée et institutionnalisée en France .......................................................................................... 63
4.1 Dans les discours médiatiques ............................................. 63
4.2 Dans les textes et discours institutionnels (écrits ou oraux) .............................................................................. 66
5. Ressources et arguments pour se défendre contre la glottophobie ................................................................... 75
5.1 Textes interdisant la glottophobie en France (textes internationaux, textes français) ................................................. 75
5.2 Se défendre et porter plainte contre des discriminations glottophobes en France (saisir le défenseur des Droits, porter plainte, se faire accompagner par des associations) 82
Annexe I. Entretiens parus dans la presse ..................................... 85
Annexe II. Exemples de messages reçus ......................................... 117
Bibliographie .......................................................................................... 121
Article critique:
Deux ans après la parution du très médiatisé Discriminations : combattre la glottophobie, Blanchet et Stéphanie Clerc Conan publient une anthologie originale de « témoignages de glottophobie », agrémentée de « moyens de se défendre ». Autant dire que, comme le précédent (ce qui explique en partie son succès), l’ouvrage échappe aux formats académiques classiques : ce n’est ni un texte théorique, ni un essai, ni une étude de cas, ni un manuel, mais un corpus de textes courts, mis à disposition des chercheurs et des chercheuses mais aussi du grand public. Pour rappel, la glottophobie, terme créé et utilisé par Blanchet dès les années 1990, désigne une « xénophobie fondée sur le mépris de la langue de l’autre » (quatrième de couverture).
Le chapitre 1, courte présentation du livre, explique pourquoi il est important de « donner la parole aux victimes de glottophobie ». Il précise que beaucoup des témoignages ont été recueillis suite à la parution du livre de 2016, qui a valu à l’auteur un « afflux de témoignages », des retours spontanés par courriel et courrier parfois prolongés par des entretiens téléphoniques, sans compter les nombreux témoignages diffusés par les médias. Une autre partie du corpus a été collectée par les étudiant·e·s des universités Rennes 2 (master, doctorat) et Aix-Marseille (terrain scolaire encadré par Clerc Conan). Si la majorité du corpus porte sur la situation française et francophone, c’est en raison des terrains des auteur·e·s, mais il est bien précisé que la glottophobie n’est pas une spécificité française.
Le chapitre 2, le plus volumineux, propose des « témoignages de glottophobie vécue, classés par domaines et sous-domaines », parmilesquels l’éducation, l’emploi, la santé, la vie quotidienne et les institutions. Quelques notes de bas de page indiquent des sources, et les témoignages sont compilés les uns à la suite des autres, avec des sous-classements à l’intérieur des grandes sections ; par exemple sous la section « Éducation », on trouve des témoignages « En famille », « À l’école », « Au collège et au lycée », « À l’université et dans les classes préparatoires aux grandes écoles », « En recrutement et formation d’enseignant·e·s »…
Le chapitre 3 laisse la place à deux « récits de vie » présentés comme des « témoignages longs » même s’ils ne font respectivement que 4 et 6 pages. De courtes « biographies langagières » de la part de deux femmes, l’une autour du catalan en Roussillon, l’autre autour du turc (mais aussi du français), en Turquie et en Alsace.
Le chapitre 4 pointe des « exemples de glottophobie généralisée et institutionnalisée en France », essentiellement dans les discours médiatiques ou dans les « textes et discours institutionnels ». On y retrouve notamment des exemples tristement fameux qui ont pu faire l’actualité, comme ces menaces proférées à l’encontre de deux institutrices d’une école corse qui ont voulu faire chanter « Imagine » de John Lennon en plusieurs langues, dont l’arabe ; ou encore l’extrait d’un texte de Michel Onfray paru dansLe Monde en 2010 qui affirmait que « la langue régionale exclut l’étranger », l’affirmation du député Henri Guaino selon qui « promouvoir les langues régionales est un retour aux principautés et aux féodalités du Moyen Âge » (2014), ou le tweet laconique du ministre de l’Éducation nationale française Jean-Michel Blanquer, le 15 novembre 2017 : « Il y a une seule langue française, une seule grammaire, une seule République », qui peut recevoir une interprétation de marque de glottophobie.
Le chapitre 5 constitue la partie « pratique » de l’ouvrage et propose des « Ressources et arguments pour se défendre contre la glottophobie ». Dans un premier temps sont rassemblés des textes, internationaux et nationaux, interdisant la glottophobie (ainsi, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, laConvention relative aux droits de l’enfant, la Charte européenne des droits fondamentaux, des articles du code pénal, du code du travail ou du code de l’éducation. Ensuite, trois moyens pour se défendre contre la glottophobie (en France) sont proposés : saisir le Défenseur des droits, porter plainte et se faire accompagner par des associations.
Le livre se termine par deux annexes (l’une reproduit des entretiens parus dans la presse : L’Express, Télérama, CQFD… ; l’autre six courriels reçus par Blanchet) et une bibliographie de deux pages.
Ce livre est un complément évident à Discriminations : combattre la glottophobie de Blanchet (2016). Il fournit un corpus de textes utile pour les chercheurs et les chercheuses, qui pourront y trouver matière à analyses et à comparaisons, mais aussi pour les enseignant·e·s qui pourront y puiser des cas ou des textes à étudier, et de bons sujets d’examen ! Cette série de témoignages ne manquera pas de frapper le grand public, qui aura l’occasion de voir à quel point la glottophobie est répandue, parfois de manière presque invisible ou insidieuse, dans différents domaines de la société et jusque dans le discours institutionnel, en portant aussi bien sur l’usage des langues que sur les accents que l’on peut avoir dans ces langues.
La profusion de témoignages offerts présente cependant un problème : l’absence quasi totale de contexte. Beaucoup de témoignages sont livrés sans que l’on sache qui les a énoncés : pas d’information sur l’identité, l’âge, le sexe, la profession, le contexte du témoignage (lieu, année…), ni le contexte de recueil. Certes, l’effet d’accumulation peut suffire à « faire preuve », si besoin était, de l’existence de comportements glottophobes ou perçus comme tels. Malgré tout, l’analyse sociolinguistique ne peut se faire hors contexte, et l’on atteint ici la limite de ces textes : utiles pour marquer les esprits et montrer la diversité de la glottophobie, ils sont difficilement analysables en profondeur et se présentent davantage (mais c’est un choix partiellement assumé) comme des témoignages de type journalistique. Ce qui est dommage, car un effort de contextualisation aurait pu permettre de donner plus d’épaisseur à ces témoignages (à envisager dans une éventuelle deuxième édition ?).
Par ailleurs, on sait que Blanchet a reçu beaucoup de témoignages par écrit (courriels, courrier) et que les étudiant·e·s de Rennes 2 et d’Aix-Marseille université ont recueilli des témoignages oraux, qui ont été transcrits. On pourra cependant regretter de ne trouver presque exclusivement que des textes très structurés, visiblement rédigés par des personnes dotées d’un certain bagage académique, et moins de témoignages oraux spontanés. À moins que la matière orale ait été retouchée, arrangée pour gommer les hésitations, les reprises, ce qui n’est cependant pas précisé.
Enfin, vu la place que cela occupe dans le sous-titre, on peut être déçu par les « moyens de se défendre » qui sont proposés en une page et demie, et qui renvoient vers des instances juridiques. On aurait pu croire que les auteur·e·s allaient proposer des arguments plus concrets pour une forme d’« émancipation linguistique », pour faire écho à un livre récent (Candea et Véron 2019). Certes il est bon de « donnerla parole » et de rassembler des textes qui sont souvent méconnus, mais les auteur·e·s auraient eu la place de construire un discours argumentatif qui aurait été tout aussi utile.
Avec ces deux points, on touche à la fois les qualités et les limites de ce livre : on peut y dénicher des témoignages ou des textes intéressants pour travailler autour de la glottophobie, mais le livre en lui-même n’apporte rien de plus sur le sujet, si ce n’est de la matière, que l’ouvrage de Blanchet paru en 2016. Un très bon complément à une œuvre qui, cependant, continue de faire parler de la glottophobie au niveau des médias et du grand public, ce qui est déjà une chose remarquable.
Article de Médéric Gasquet-Cyrus, publié dans Langage et société 2019/3 (N° 168), pages 161 à 164, mis en ligne sur Cairn.info le 02/10/2019 https://doi.org/10.3917/ls.168.0161
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