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Flamenca et les novas à triangle amoureux - Une étude de Dominique Luce-Dudemaine sur la contestation et le renouveau de la fin'amor, dans trois grands récits occitans du moyen âge : un nouvel art d'aimer est en train de naître, plus orienté vers le bonheur et l'accomplissement amoureux. Presses Universitaires de La Méditerranée.
Type | Broché |
Année | 2012 |
Langue | Français + Occitan |
Pages | 170 |
Format | 16 x 24 cm |
Distributeur | Presses Universitaires de La Méditerranée - PULM |
Label | Études occitanes |
ISBN | 978-2-84269-800-3 |
Bonus | Textes originaux en occitan, avec traduction française |
Flamenca et les novas à triangle amoureux : contestation et renouveau de la fin'amor - Dominique Luce-Dudemaine
La littérature occitane du Moyen Âge, surtout riche de sa poésie lyrique, compte aussi quelques chefs-d’œuvre dans le genre narratif comme le roman anonyme de Flamenca, Las novas del papagay d’Arnaut de Carcassés, et le Castia Gilos de Ramon Vidal de Besalu.
Utilisant les thèmes chers aux troubadours, ces trois textes racontent, chacun à sa manière, le triomphe de l’amour sur la jalousie, mais leurs auteurs ne sont pas de simples continuateurs. Au contraire, leur choix littéraire sert une volonté de contestation des mythes de la fin’amor. Dans leurs œuvres se lit l’influence de nombreux récits et textes didactiques d’oc et d’oïl et, de ces influences croisées, naît un nouvel art d’aimer qui est aussi un nouvel art de vivre.
Collection Études occitanes 1 - 2007, Presses Universitaires de La Méditerranée (PULM).
Sommaire:
Introduction
I- La jalousie et l'amour
Une relation paradoxale
La naissance de la jalousie, révélatrice des imperfections de la société courtoise
Le gilos ; construction d'un personnage nouveau
Amors contre le gilos
Amors et les Amants
II- La Dame
Une partenaire active
III- L'Amant
L'instrument du destin
IV- Un art d'aimer, un art du bonheur
L'insondable cœur féminin
L'égalité en amour
L'aspiration au bonheur
V- L'enseignement aux Dames dans Flamenca
Un code précis et contraignant
L'usage de la force en dernier recours
VI- Castia Gilos, un cadre propice à la contestation
VII- Les fins amanz et la société de cour
Conclusion
Bibliographie
FLAMENCA
CASTIA GILOS, DE RAIMON VIDAL DE BESALU
LAS NOVAS DEL PAPAGAL, D'ARNAUT DE CARCASSÉS
Extraits:
Introduction.
Si l'œuvre lyrique des troubadours domine la littérature occitane du Moyen Âge, quelques textes narratifs retiennent aussi l'attention par leur caractère original. Ainsi, les novas peuvent se définir comme des récits à caractère fictif, composés en vers octosyllabiques à rimes plates, de longueur très variable. Jaufré et Flamenca, qui peuvent nous apparaître comme des romans, sont désignés comme novas par leurs auteurs, ainsi que des textes beaucoup plus courts, des « nouvelles » comme celles de Raimon Vidal de Besalu et d'Arnaut de Carcassés.
À l'exception de jaufré, composé à la fin du xiie siècle, si on accepte les conclusions de Rita Lejeune, les novas ne sont pas antérieures au xiiie siècle : elles n'appartiennent plus au siècle d'or de la littérature d'oc, mais à ce que Charles Camproux appelle son « âge de fer ». Or, en cette période de déclin relatif, les auteurs romanesques montrent un attachement profond à l'idéal de fin'amor dont ils font le sujet de leurs récits.
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I- La jalousie et l'amour
Une relation paradoxale
Le Castia Gilos de Raimon Vidal, Las novas del Papagai d'Arnaut de Carcassés et Flamenca présentent des schémas narratifs comparables, qui aboutissent simultanément au châtiment de la jalousie et au triomphe de l'amour. L'évolution des rapports entre les trois personnages, dame, mari et amant, domine l'intrigue. Le mari est homme de pouvoir : le seigneur anonyme, maître du château dans le Papagai, comme Archimbaut de Bourbon et Alphonse de Barbastre, sont les tenants d'un domaine considérable. Mais en enfermant leur épouse, ou en lui tendant un piège, Archimbaut de Bourbon et Alfonse de Barbastre commettent un abus de pouvoir, et qui plus est une injustice envers des dames sans reproche, preuve d'une défiance impardonnable à leur égard1. Le jaloux sera puni en conséquence de sa faute, et ne pourra empêcher l'heureuse rencontre des amants.
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II- La Dame
Une partenaire active
Face au mari jaloux, celle qui va devenir sa victime et son ennemie est aussi le centre autour duquel gravitent les autres personnages qui l'épient, l'envient ou la désirent. La dame, sédentaire et immobile, fait l'objet d'une surveillance vigilante. Elle est le point de mire de toute la cour, comme Elvira dans le Castia Gilos, ou Flamenca avant qu'Archimbaut ne la soustraie à l'admiration générale. Chez Arnaut de Carcassés comme chez Raimon Vidal, elle constitue l'unique personnage féminin dans un monde d'hommes. Les trois héroïnes jouent un rôle déterminant dans le récit des novas : le sort de l'amant dépend de leurs initiatives, tout comme le traitement réservé au mari jaloux. D'un caractère passionné, la dame peut sembler imprévisible, ce qui la rend plus dangereuse : Elvira de Barbastre, par son intelligence et sa détermination, montre une évidente supériorité sur ses partenaires masculins.
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III- L'Amant
L'instrument du destin
Le troisième personnage du triangle, le dernier présenté par les narrateurs des novas, est celui par qui sera libérée la dame et châtié le jaloux. L'amant est l'instrument du destin. Le portrait de Guilhem de Nevers est exceptionnellement long et détaillé. À son arrivée à Bourbon, le jeune chevalier n'est pas sans rappeler le damoiseau Jaufré, lorsqu'il se présente à la cour du roi Arthur : leur stature, leur teint, l'expression enjouée de leur regard, leur éclat juvénile les rapprochent1. Mais le raffinement des vêtements de Guilhem de Nevers le distingue, évoquant davantage le costume de Déduit, dans le poème de Guillaume de Lorris, que la mise simple de Jaufré, dans son costume de voyage2. Comme Déduit, l'amant de Flamenca porte de riches habits de soie, le premier de samit, l'autre de cisclaton (v. 5825 ss.) ; Déduit, comme Jaufré, est couronné de fleurs, mais Guilhem porte un couvre-chef plus sophistiqué :
Un capel lini, ben cosut
Ab seda, e moscat menut.
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IV- Un art d'aimer, un art du bonheur
Dans les trois novas « à triangle », l'union des amants va se réaliser grâce aux circonstances créées par le gilos. Le récit tout entier tend vers le triomphe de l'amour, dont le châtiment de la jalousie constitue un épisode quelque peu secondaire.
L'insondable cœur féminin
La nouvelle de Raimon Vidal accorde moins de place à l'intrigue amoureuse que Flamenca et le Papagai. Le succès de l'amant y paraît à la fois aléatoire et inéluctable : les souffrances qu'il endure, sa situation critique et injuste, et surtout son infinie soumission à l'amour, qui le fait renoncer à toute fierté chevaleresque et l'amène à risquer sa vie, créent une tension pathétique que rien ne peut résoudre sauf l'intervention bénéfique de la dame. Les circonstances qui réunissent les amants sont providentielles, mais Amors ne veille-t-elle pas à ce que le mérite soit récompensé et l'injustice réparée ?
Dans le Papagai, le jaloux est relégué hors du cadre narratif proprement dit.
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V- L'enseignement aux Dames dans Flamenca
La réalisation d'un bonheur éphémère ou durable est donc le point d'aboutissement des récits des novas « castia gilos ». Cette conception optimiste de l'amour s'exprime dans Flamenca à travers un discours didactique amplement développé qui s'adresse aux dames. Le ton en est vif, net, souvent revendicatif et véhément. Le romancier anonyme prend ici de vraies distances avec l'érotique des troubadours qui lui inspire des sentiments contradictoires oscillant entre la nostalgie, la fidélité et le désir assumé de rupture.
Un code précis et contraignant
Pour exposer ses théories sur l'amour, l'auteur utilise ses personnages, en particulier l'héroïne. En effet, si Guilhem analyse tout au long de ses discours les sentiments qui l'animent et les vertus propres au fin aman, cette découverte de soi, tout en ayant valeur d'exemple, ne donne pas lieu à l'élaboration d'un code destiné aux jeunes gens.
[...]
VI- Castia Gilos, un cadre propice à la contestation
Le thème du Castia Gilos, présent à différents degrés dans Flamenca et le Papagai, n'a pas pour unique vocation d'illustrer le triomphe de la fin'amor. Si la jalousie met en cause l'équilibre de la société courtoise, son châtiment par l'adultère porte atteinte à l'ordre établi, et les événements montrent les failles du groupe social, ses conflits internes et les limites morales des individus : c'est un cadre narratif qui se prête à la contestation.
Son succès dépasse les limites de la littérature d'oc, comme en témoigne notamment sa présence dans plusieurs fabliaux, où les relations amoureuses n'entretiennent qu'un lointain rapport avec l'érotique courtoise. Toutes ces œuvres ont toutefois en commun de mettre en scène le triomphe de l'amour extraconjugal et la défaite du mari, détenteur craint et envié du pouvoir économique, social et politique.
[...]
VII- Les fins amanz et la société de cour
Dans la littérature courtoise d'oc et d'oïl, qu'elle soit lyrique ou narrative, les amants ne sont pas seuls au monde. S'il n'est pas de bonheur sans amour, la félicité ne saurait non plus se définir comme une solitude à deux. L'amour, s'il ne connaît que ses propres lois1, place les individus en situation de conflit avec une société redoutablement organisée pour se défendre de toute atteinte à l'ordre établi. Au lieu de vivre au cœur d'une communauté dont ils bafouent souvent les lois, les amants pourraient choisir la fuite. Mais malgré les périls encourus, ils ne désirent profondément que vivre en paix au sein d'une société dont ils ne contestent ni le bien-fondé ni les règles, et qui est présentée comme l'unique lieu de culture et de civilisation.
Cette contradiction déchire Tristan et Yseut que leur passion transforme malgré eux en hors-la-loi.
[...]
Conclusion
Les auteurs des novas, quelle que soit leur dette envers les poètes lyriques, ne sont pas de simples continuateurs. Le choix d'un genre narratif indique une volonté de se démarquer du grand chant courtois. Au-delà de ce désir de changement formel, leur projet littéraire est différent. Ils ont en commun, malgré les différences importantes qui séparent les trois œuvres, la volonté de montrer - et non de suggérer - un art de vivre heureux, la plénitude du désir accompli dans le plaisir, en résolvant la tension joie-douleur, espoir-désespoir, qui anime le grand chant courtois. Plus d'inquiétude ici, mais un itinéraire vers l'accomplissement hédoniste. Tandis que le joi des troubadours est indépassable, quelle que soit la fortune ou l'infortune de l'amant, le bonheur des amants dans les novas doit être avant tout réalisé.
Moins idéalistes, les narrateurs montrent aussi un esprit de contestation servi par le choix du thème « castia gilos ».
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La découverte de récits qui vont au dela de la poésie, très intéressant